Première salve contre le droit local d’Alsace-Moselle
Par une de ces surprenantes coïncidences de l’histoire, c’est quelque jours seulement après la décision dite historique de consulter les Alsaciens sur la fusion des collectivités que le Conseil constitutionnel tire une salve meurtrière sur un pan important de notre droit local.
Supériorité du régime local sur le régime général
De quoi s’agit-il ? Le régime des corporations obligatoires, en vigueur dans notre région depuis plus d’un siècle, vient d’être déclaré anticonstitutionnel par la haute juridiction de l’État français.
Or ce régime, qui a donné satisfaction depuis sa création, a largement fait la preuve de sa supériorité sur le droit commun. C’est grâce aux corporations de métiers que l’artisanat et l’apprentissage des jeunes ont pu, ici plus qu’ailleurs, prospérer depuis des décennies.
Mais des esprits chagrins ont estimé que l’affiliation obligatoire aux corporations de métiers était incompatible avec les textes fondateurs que sont la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 et la fameuse Loi Le Chapelier de 1791. Ces textes fondant prétendument la liberté d’entreprendre avaient à l’époque pris délibérément le parti des employeurs contre les corporations de métiers qui assuraient sécurité, couverture sociale, formation des jeunes, justice et équité pour leurs membres.
Nos corporations de métiers sont en danger
Ces dispositions du droit local ont pu survivre aussi longtemps que la saisine du Conseil constitutionnel n’était par élargie. Mais depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, il existait un risque accru – et connu – qu’une question porte sur le caractère obligatoire des corporations d’Alsace-Moselle… Et ce qui devait arriver arriva.
L’affiliation obligatoire aux corporations de métiers telles qu’elles existent en Alsace-Moselle vient d’être déclaré contraire à la Constitution française. Cette décision prise à Paris va ébranler et fragiliser nos corporations ici, en Alsace ; elle est donc contraire à l’intérêt de l’Alsace.
Pourtant, ils auraient pu et dû prévoir
Si les élus UMP alsaciens avaient tenu leurs promesses électorales prises pendant la campagne des élections régionales de 2010, La Collectivité unique d’Alsace existerait aujourd’hui et la compétence en matière de Droit local aurait pu être transférée de l’État à la Collectivité depuis longtemps. Le Conseil constitutionnel n’aurait alors pas eu de décision à prendre sur cette question qui n’aurait plus concerné que les Alsaciens eux-mêmes.
Et l’Institut du droit local dans tout ça ?
Il existe un Institut du droit local dont la mission est de conseiller les élus et les acteurs de la vie économique et sociale dans ce domaine. Qu’ont fait les responsables de l’Institut pour prévenir ce qui vient d’arriver ? Rien. Pourtant, il aurait été possible de corriger certains aspects du dispositif et de faire ratifier les modifications par l’Assemblée nationale. Encore eût-il fallu trouver un parlementaire alsacien pour porter le dossier.
Comme il est illusoire d’espérer une réforme de la Constitution qui nous permettrait de revenir au régime antérieur, il ne reste que la perspective de faire transférer à la Collectivité régionale la compétence en matière de droit local à la faveur de la fusion de la Région et des Départements.
Ceci est possible à une condition : que les responsables politiques de notre région bâtissent un projet de fusion ambitieux, à la hauteur de ce qu’espèrent et méritent les Alsaciens.
Jacques Cordonnier
Président du Mouvement régionaliste Alsace d’Abord